Les atouts de la Belgique face à la Transition écologique

Bruxelles est construite sur un marais. Que se passe t’il dans un marais ? Une gestation lente et profonde de micro-organismes, dans le silence total, à plusieurs profondeurs, une vie secrète en quelque sorte… Les sédiments servant de “filtre naturel” pour les contaminations.

Parfois ça ne sent pas très bon quand c’est remué, mais un moment, émerge de tout cela, un monde végétal et animal porteur de vie, parfois fort surprenant.

La Belgique fait partie des pays qui peuvent être qualifiés de «poissons pilotes» dans certaines avancées.

La Situation du moment

L’observateur aguerri conviendra que le progrès, en termes “occidentaux”, est désormais synonyme de dégénération. Le modèle occidental a réussi, en un demi-siècle, à créer une croissance puissante, mais également à :

  • Détruire les personnes : >50% de la population totale est en état d’hyper anxiété, de stress, d’épuisement professionnel, de maladie chronique ou burnout, en perte de sens. Même les jeunes.
  • Détruire la nature : >70% du vivant a déjà disparu.
  • Détruire son économie : les États souverains sont en faillite virtuelle, avec leur modèle social; la démographie est vieillissante est incapable de soutenir le système social; la relocalisation de l’industrie n’est qu’un rêve éveillé; la dépendance vis-à-vis d’autres pays et continents est irréversible (énergie, ressources, main-d’œuvre); la déflation et la récession sont à l’ordre du jour pour les trois prochaines décennies, accompagnées d’une agitation sociale. Les systèmes monétaires et gouvernements sont incapables de faire face à la convergence historique de multiples défis systémiques.
  • Détruire sa souveraineté politique : la politique se résume à des récits simplistes, à un comportement réactif à court terme, nous rendant tous dépendants d’acteurs aux agendas discutables. Les guerres sont les réponses ultimes à l’aveu d’échec, sur fond d’égos et de névroses collectives.

Les atouts de la Belgique

La Belgique ressortira ses atouts au bon moment, c’est certain. Au moment où elle devra le faire, par obligation, afin de survivre collectivement. Le bon sens belge reprendra le dessus grâce à ses bases, et racines profondes.

1. La diversité culturelle

Belgique (Bruxelles) culturellement hyper-diversifiée (n°2 après Dubai), un atout majeur, mais encore sous-capitalisé, non valorisé. De multiples talents sont déjà présents sur le territoire. Nous sommes à la croisée des chemins des cultures : germanique (structurés), latine (poétique et visionnaire), anglo-saxonne (pragmatique) + 180 autres nationalités. C’est un atout absolument fabuleux car nous aurons besoin de différentes approches, le meilleur de chaque monde. Et…rapidement. Partager les expériences de chaque peuple et atouts de chaque culture, face à une remise en question profonde, collective.

2. Le centre du monde de beaucoup de choses:

Le QG de nombreux business stratégiques et globaux y est présent.

Bruxelles est le centre “nerveux” des lobbies, de l’UE, de l’OTAN, des think tanks, et de diverses institutions et fédérations. Elles pourront rapidement relayer, agir, pour valoriser les nouvelles approches crédibles, avec leurs savoirs et atouts uniques.

Il y a également une concentration unique au monde des meilleurs diplomates, avec leur ligne ouverte vers leur chefs d’État (qui n’est le cas uniquement qu’à Bruxelles et à Washington). Ce qui se fera d’intéressant ici en Belgique, va se savoir immédiatement dans toutes les cours royales, et présidences du monde.

3. Carrefour d’expertises uniques:

Des universités et véritables centres de compétences, comme par ex. KUL, Uliège, UGent, (qui ensemble investissent +/- 3 milliards/an en R&D) — excellents chercheurs — et même de “trouveurs” d’innovations (de Adolphe Sax à Arthur Deleval).

Et.. tout passe par Bruxelles, tôt ou tard: les bonnes idées, les inventeurs, les investisseurs, les dirigeants, les leaders d’opinion, bref, tout et tout le monde. Conférences, rencontres, pitch, lobbies positifs, fédérations, symposiums public ou secrets,…

Des experts toutes catégories aussi, et le meilleur des visionnaires, comme Club of Rome et Club of Brussels.

Les mauvaises nouvelles aussi, passent par Bruxelles, ce qui nous offre la créativité des antidotes, et ceci, en primeur. Des “anticorps” en quelque sorte qui pourront s’activer une fois que nous y serons vraiment obligés.

Certaines entreprises expertes comme Graydon ont accès à datas, relié à une nouvelle intelligence permettant de catalyser entreprises individuelles et territoires vers l’ESG et la régénération.

Il y a aussi une concentration unique au monde de coach, thérapeutes, mentors, consultants, chamanes, prof de yoga, arts martiaux et guérisseurs en tous genres — on peut réellement “tout” faire et expérimenter en Belgique en termes de développement et épanouissement de soi, ou de guérison. Tout cela sera de plus en plus stratégique pour remettre la population d’à-plomb.

4. Marché-test “exigeant” :

Pour y tester ce qui marche ou qui ne marche pas, et ensuite implémenter à l’étranger. Exigeant, diverse, pragmatique, mais accessible sur une petite surface dense de nombreux acteurs divers.

C’est un excellent “marché test”, bien maillé, exigeant, pragmatique. Comme le pays est petit, et très bien connecté (dans tous les sens du terme), les bonnes pratiques se feront rapidement connaître, et l‘accélération et expérimentation est rapide.

C’est en quelque sorte un méga “bac à sable d’expérimentation”, comme le Chili en Amérique Latine, le Botswana ou la Zambie en Afrique, ou encore Singapour en Asie.

5. Géographie

Il y a des trains grande vitesse et vols vers de nombreuses capitales d’Europe et du monde entier. Finement maillée, reliée, avec accès rapide vers les pays européens majeurs, par route, eau, rail, et air. Un disque de pétri idéal, sur lequel nous pouvons déposer une loupe d’observation.

La Belgique est au centre d’un marché puissant (Paris et Hauts de France, Luxembourg, la Ruhr, les Pays Bas), proche du Royaume Uni.

Les connexions par voie d’eau, canaux et rivières, port de haute mer, par route ou rail, ou fret, sont très nombreuses, et accessibles.

6. PME (familiales) leaders mondiaux

Excellentes dans leur secteur, avec une éthique et un sérieux reconnu à l’international dans leur métiers, offrant donc une excellente réputation. Ce tissu entrepreneurial PME est de tout premier plan. Par exemple, au Limbourg ou en Flandre occidentale, parfois dans le silence total, des petites entreprises familiales ou startups opèrent dans le monde entier et ont réputation de leaders d’opinion planétaires (Zetes, Sika, Katoennatie, Deme, Solvay, Umicore, …).

7. Beaucoup de belges sont “bien” présents à l’étranger

Avec leurs terrains, ONG’s, investissements, entreprises, communautés, pour représenter, tester, valider, montrer, partager leurs excellences et pratiques sont très bien reçus. Leur réputation est: pragmatique, ingénieux, professionnel, sérieux et allant au fond des choses, humble, et sans chauvinisme. D’autres nationalités ne sont pas toujours aussi bien reçues, de par le comportement passé de leurs entrepreneurs et gouvernements.

Le belge est un peuple adaptable, capable de compromis de bon sens, de rencontres cordiales, et d’intelligences collectives “smart”: experts en compromis gagnant pour tous.

Nous avons été si souvent envahis, croisant ainsi toutes les cultures environnantes, que pour des raisons de survie nous avons développé le sens de “mettre tout le monde d’accord”… projetant certains de nos leaders à des postes internationaux clés.

8. Modèle sociétal, social, politique, institutionnel, systémique, arrivé à maturité

Même si le taux d’épargne est le plus élevé au monde en Belgique, le modèle est arrivé au-delà de sa maturité. Des effets secondaires néfastes se manifestent depuis des décennies: hyper-endettements et déficits chroniques, statut de chômeurs héréditaires, charges entrepreneuriales prohibitives, burn-outs collectifs dans enseignement et soins de santé, épuisement et confusion,…

De plus, il règne un conservatisme d’un peuple qui aurait “tout à perdre”, espérant secrètement l’avènement d’un nouvel âge d’or en continuant avec comme inertie leur train-train quotidien.

La société belge doit muter, ou mourir. La Belgique sera donc un de premiers pays à shifter vers du « Deep ESG », régénératif, revenant aux bases de bon sens et de gestion saine. Elle sera la première a — de façon pragmatique et surréaliste — à se réinventer. Nous serons donc, dans ce pays, aux toutes premières loges d’un spectacle historique de tout premier plan. Et donc, les premiers à pouvoir ré-exporter cette nouvelle intelligence sociétale, environnementale, humaine, vers d’autres pays avec enjeux similaires.

9. Surréalisme, et entrepreneurs disruptifs

La Belgique a une concentration élevée de surréalistes qui ont marqué leur époque, en plus des milliers de belges cocasses et décomplexés qui illuminent nos soirées depuis toujours: Magritte, Nougé, Stromae, Hamoir, Delvaux, Mariën, Dotremont, Devos, Vanhoenacker, JC Van Damme, Arno, Urbanus, Brel, Damiens, Culliford, Poelvoorde, Geluck, … C’est l’humour et le surréalisme notamment qui nous permettra peut-être de “rebooter”, rebrancher nos neurones différemment pour construire ce monde dont nous rêvons vraiment : créatif, disruptif et étonnant, frais, amusant, motivant, énergisant, performant, abondant. Et certainement pas avec les oiseaux de mauvaise augure qui font peur à tout le monde dans les médias assoiffés de scoops — sans la moindre propositions de solutions.

La Belgique étant la deuxième puissance industrielle après le Royaume-Uni, il n’y a de cela même pas un siècle, nous avons probablement encore dans le sang des morceaux d’ADN de pionniers, de créateurs, d’entrepreneurs, d’artistes qui marquent l’histoire. Aujourd’hui encore, des entrepreneurs humbles mais puissants attendent une nouvelle histoire pour se mobiliser. C’est peut-être celle-ci.

La Belgique pourrait devenir pionnière mondiale d’une transition régénérative

Un des premiers pays probablement à crouler sous ses propres incohérences, elle pourrait se retrouver en “pole position” d’un nouveau paradigme économique et sociétal. Nous verrons probablement les prémices de tout ceci suite aux élections de 2024. Comment gérer des enjeux hypercomplexes, dans un pays surendetté, démographiquement âgé, avec infrastructures vieillissantes et avec un peuple suffisant, oisif et divisé ?

Quelques freins

  • Manque de vision holistique et systémique de la part des dirigeants business et du politique, des enjeux qui sont entrain de converger (bâti public, habitat, énergie, déchets, situation mentale, décalages divers, …).
  • Hyper réglementation qui empêche de bouger les lignes.
  • Coût parfois prohibitifs entrepreneuriaux.
  • Petitesse d’esprit : jalousie, cynisme, suffisance, manque d’entraide et de solidarité, de générosité, égoïsme, paresse intellectuelle, oisiveté.
  • Le pays est considéré comme raciste, et sale, par les étrangers qui ont l’habitude de voyager.
  • Démographie vieillissante. La chasse aux talents est ouverte, augmentant de mois en mois de façon mécanique — avec le blocage des frontières aux influx de talents.
  • Blocages urbanistiques et effets “NIMBY”. Ceci combiné avec une crise double de la construction et de l’habitat.
  • Psychologie plate : il n’y a pas encore assez « besoin » de se bouger, ni de se prouver à l’international.

Comment faire concrètement

La vieille Europe est confrontée à une convergence historique de fondamentaux profonds. En tant qu’institution, l’Europe en général, et la Belgique en particulier, a longtemps été le leader mondial dans la mise en œuvre de règles et de réglementations. Certaines sont vertueuses (environnementales, sociales), d’autres sont vicieuses (régulation des semences, développement urbain). La Belgique y est au centre.

Ces règles ralentissent considérablement les révolutions nécessaires et bloquent les innovations perturbatrices. De plus, ces innovations-là, salutaires, quittent souvent l’Europe pour s’installer sur d’autres continents plus accueillants.

Voici comment que la BELGIQUE pourrait faire pour se positionner en territoire “expert” en transition écologique et sociétale :

1. Avertir

Montrer aux “autres” les failles du système capitaliste de libre marché. Il est entrain d’échouer. Il a ruiné les gens, saccagé l’environnement et torpillé les économies dont il se targuait. Le modèle basé sur la dette est en faillite systémique. Il faut oser montrer les mauvais résultats. Ne faisons pas les mêmes erreurs. Proposons quelque chose de plus intelligent.

2. Rassembler

Grâce à sa position centrale, Bruxelles est idéalement placée pour rassembler les principales parties prenantes, les experts, les innovateurs, les acteurs du secteur public, les entreprises et les lobbies constructifs, autour de toutes les fonctionnalités de la société. Soyons le lieu de rassemblement dont le monde a tant besoin.

3. Connecter

Reliez les joueurs aux ressources — matérielles et immatérielles — afin qu’ils puissent travailler en marge de la société qui s’effondre, en imaginant et en créant le nouveau. Faire bouger les lignes. Au sein de l’Europe et autour d’elle, se connecter au reste du monde. De manière non dogmatique.

4. Tester

Nous vivons dans un endroit magnifique, peuplé de personnes créatives et professionnelles, où nous pouvons et devons mettre au point de nouvelles approches sur des questions majeures. Pensons à la formation, à l’énergie, à l’alimentation, au logement, à la mobilité, aux technologies intelligentes et à faible coût, à la biodiversité, à l’agriculture, à l’immobilier public, aux soins de santé, à l’éducation, aux emplois locaux régénératifs, et à bien d’autres enjeux encore.

5. Inspirer

Grâce à cette vision, à l’innovation, à l’expérimentation, aux tests et au prototypage, Bruxelles (la Belgique ou l’Europe) peut devenir une vitrine pour le reste du monde. Le monde nous regarde.

6. Former

Tirer parti des réussites en partageant les clés et la compréhension sur des projets réels, en direct, dans des villes et des pays du monde entier. Déployez des équipes pluridisciplinaires pour exporter les connaissances et l’expertise en vue d’une régénération globale et multidimensionnelle.

7. Développer à échelle

Développer ces premiers succès sur le terrain, permet à davantage d’acteurs de progresser et d’accélérer, récolter les bénéfices, servir les communautés et régénérer l’environnement et les emplois.

8. Construire

Construire les “villes de lumière” de la prochaine génération, où les gens s’épanouiront, accomplissent leur destin et nous aideront tous à aller de l’avant.

La Belgique peut, et doit être la meilleure dans ce domaine. Mais un peu d’humilité ne ferait pas de mal. Reconnaître et accepter l’échec. Il faut l’assumer, apprendre et y faire face. Se relever et continuer, fort de l’expérience acquise.

Rassemblons-nous, partageons, testons et transposons à plus grande échelle les succès que nous avons trouvés.

Autre bonne nouvelle pour nous… les solutions de régénération salutaires existent déjà (allez voir sur www.kairosmultisolutions.org). Ces solutions sont d’une simplicité embarrassante. Pourquoi elles ne sont pas implémentées partout ? Car ce ne sont pas des solutions à un million de dollars, mais basée sur bon sens, l’ingéniosité, pragmatisme, partage. Allons à la rencontre de ces discrets “Îlots de Régénération” qui pointent leur nez un peu partout sur la planète, apprenons-en un maximum, aidons-les à se développer, et copiez-coller les meilleures pratiques dans d’autres communautés, villages et quartiers : bacs à sable géants de la “Nouvelle Terre” tant attendue. Sans attendre que ce soit dans l’urgence. Nous allons probablement plus apprendre des communautés qui ont dû se débrouiller avec rien, en zones de guerres et chaos, que dans les start-up labs feutrés des capitales. Centralisons toute cette intelligence en Belgique et partageons cela au reste du monde.

Conclusion

La Belgique à d’excellentes cartes en main, vraiment uniques. A elle de les jouer rapidement, intelligemment, visionnaire, et en collaboration ouverte. Et à l’image superbe de ce tapis de fleurs sur la Grand Place de Bruxelles, acceptons d’être ce rectangle de fleurs multicolores, unissant dans ce dessein parfaitement cadré, chaque combinaison de talents de chacun.

Soyons honorés de ce privilège, reconnaissons cela dans le fond des yeux des enfants venant de tous les pays. Soyons en admiration de cette beauté de diversité, témoin de cette grâce divine reçue comme un cadeau — mais aussi comme une responsabilité historique. Bientôt nous pourrons voir à l’œil nu qui aura fait quoi, et pour qui. Qui aura utilisé ses talents, et qui les aura laissés enterrés.

Prof. Michel A. de Kemmeter

www.kairosmultisolutions.org

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Michel A. de Kemmeter - Kairos -Extrapreneurs CofB

Expert in economic transition, keynote speaker, author, consultant and investor. Professor. Inventor of “Systemic Economy” and "Kairos Multisolutions" crypto.